Même si elles peuvent procurer de grands rendements, les semences biologiques ne séduisent pas pour autant les agriculteurs sénégalais. Dont certains lors d’un débat, hier à l’Isra, sur les enjeux des Organismes génétiquement modifiés pour l’agriculture sénégalaise, ont fait part de leur réticence vis-à-vis des Ogm.
Ils veulent rester à l’agriculture naturelle. Des producteurs sénégalais ne veulent pas des semences biotechnologiques. Lors d’un débat, organisé hier à l’Institut sénégalais de recherche agricole (Isra), par le Fonds national de recherche agricole et agro alimentaire sur ‘Enjeux de l’utilisation des semences Ogm dans l’agriculture sénégalaise’, ils ont montré leur réticence quant à l’utilisation de semences biologiques dans l’agriculture nationale. En effet, pour ces producteurs, le contexte de l’agriculture sénégalaise n’exige pas d’introduire les plantes transgénétiques dans le pays. Cela, parce que, pensent-ils, un problème de semences ne se pose pas en ce moment.
Président du Cadre de concertation des producteurs d’arachide (Ccpa), El Hadji Ibrahima Niass pense, en effet, qu’il n’y a pas d’utilité de recourir à ce genre de semences dans la mesure où les paysans ne sont pas confrontés à des problèmes de semences de qualité, mais plutôt à la cherté des semences de qualité. ‘Pour le moment, je ne vois pas l’utilité des Organismes génétiquement modifiés (Ogm) au Sénégal. Parce qu’on a assez de semences pour pouvoir produire sans pour autant recourir à l’utilisation des Ogm’, souligne-t-il.
Pour ce dernier, il faut juste divulguer l’information des résultats de la recherche sénégalaise qui propose déjà des semences de qualité aux producteurs et faire en sorte qu’elles soient plus accessibles. ‘Les producteurs eux-mêmes font leurs propres semences, les organisations de producteurs en font autant. Le problème des semences de qualité au Sénégal est un problème de prix. Puisque tout ce que l’Institut sénégalaise de recherche agricole (Isra) produit en pré-base, il y a des organisations de producteurs qui les multiplient. On n’a pas encore besoin d’utiliser des semences d’Ogm’, fait-il remarquer.
Cherté des semences biotechnologiquesEn outre, Niass trouve les semences biotechnologiques hors de portée des paysans sénégalais. Qui seront obligés de s’en procurer chaque année. En effet, pour le président du Ccpa, les producteurs ne pourront plus être en mesure de produire eux-mêmes des semences, comme ils le font actuellement lors des récoltes. ‘Les Ogm ne le permettant pas. Ils seront obligés, chaque année, d’acheter des semences à des prix hors de portée. Puisque, selon certains chercheurs, les semences biotechnologiques coûtent trois fois plus chères que celles naturelles. Le producteur sénégalais n’a pas la capacité d’acheter les semences biologiques. Déjà, quand tu lui propose des semences de base à 600 ou 700 francs Cfa le kilogramme, c’est cher pour lui’, souligne El Hadji Ibrahima Niass. Qui pense que les Ogm au Sénégal constituent un faux débat. ‘On n’est pas encore arrivé à ce stade. Les résultats des Ogm, c’est la vache folle, la grippe aviaire, etc. Toute cette compétition-là ne nous mène qu’à des résultats catastrophiques que les pays occidentaux peuvent gérer, contrairement à nous autres pays pauvres’, prévient-il.
Ces cultures génétiques n’étant prisées que par trois pays sur le continent africain, à savoir l’Afrique du Sud, l’Egypte et récemment le Burkina Faso, Niass pense que ce sont souvent les firmes internationales qui viennent nous imposer leurs idées pour vendre leurs produits. ‘Au Sénégal, on a déjà un problème pour commercialiser toute la production arachidière. Si maintenant, on produit une grande quantité avec les Ogm, où est-ce qu’on va trouver le marché pour l’écouler’, s’interroge-t-il.
Rendements élevésPourtant, les conférenciers du jour n’ont pas manqué de souligner les vertus des Organismes génétiquement modifiés dans leurs communications. En effet, pour le Pr Arthur Dasylva, ces plantes permettent d’obtenir des rendements plus élevés. Constat confirmé par son collègue, Dr Mamadou Guèye. Qui, s’appuyant sur des études de la Fao, fait remarquer que pour les cultures les plus utilisées dans les Ogm comme le Colza, les Ogm peuvent donner jusqu’à 5,5 tonnes, 10,5 tonnes pour le coton ou 130,5 tonnes pour le maïs.
Ainsi, avec ces rendements élevés, l’exploitation des sols pourrait être moins importante et l’eau grandement économisée. ‘Il a été prouvé que l’utilisation de la variété seule, sans les autres intrants, peut amener une augmentation de 35 % de la production. Voilà pourquoi, on pousse les gens à aller acheter des semences améliorées. Elle répond aux contraintes agro-écologiques de sa zone de production’, dit-il.
Notons qu’au Sénégal, la loi sur la biodiversité a été votée mais il reste le décret d’application sur la bio-protection ; celle-ci permettrait de réglementer ces cultures, si toutefois elles venaient un jour à être utilisées dans le pays.
Seyni DIOP - Walfadjri
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