Baghera Membre V.I.P.
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| Sujet: Le Musée d'art africain de Dakar ... Sam 10 Jan 2009 - 20:36 | |
| Le Musée d'art africain de Dakar décline soixante-dix ans d'histoire contemporaine
Le géologue, botaniste et marcheur amoureux des déserts, Théodore Monod, fut le premier directeur de l'Institut français d'Afrique noire (IFAN), créé à Dakar en 1938. Devenu Institut fondamental d'Afrique noire en 1966, après l'indépendance du Sénégal, l'IFAN abrite le Musée d'art africain de Dakar, l'un des rares espaces consacrés aux arts premiers en Afrique occidentale. L'IFAN, qui dépend de l'université Cheikh-Anta-Diop de Dakar, vient de confirmer l'entrée du savant, mort en 2000, à 98 ans, au panthéon national sénégalais : l'établissement s'appelle désormais Musée Théodore-Monod.Dévoilée, comme il se doit, par les autorités sénégalaises et l'ambassadeur de France, Jean-Christophe Rufin, le 15 décembre, une plaque rappelle le rôle joué par ce "Ghandi du désert" dans l'étude de l'Afrique subsahélienne. Ce "chercheur de trésor, de brindille et de phosphore" (Alain Souchon), avait en 1938 souscrit aux volontés du gouverneur général de l'Afrique occidentale française (AOF), Jules Brevié, qui voulait fonder des succursales de l'IFAN partout en Afrique de l'Ouest. Cela permit au Musée d'art africain de collecter 95 % de son patrimoine ailleurs qu'au Sénégal : au Bénin, au Ghana, au Mali, en Côte d'Ivoire, au Nigeria... - 20 000 objets recensés en 1966, lors du Festival des Arts nègres organisé par Léopold Senghor, réduits à 9 272 aujourd'hui, selon le conservateur, Ibrahima Thiaw, sous l'effet des insectes, de l'humidité et de l'incurie. Une exposition intitulée "Soixante-dix ans d'IFAN" donne une idée assez précise de l'éclectisme du lieu : roches, crânes, papillons, animaux naturalisés, tortues, crocodiles, publications scientifiques, périodiques... L'IFAN occupe l'ancien hôtel de l'administrateur de la circonscription de l'AOF, sur une place ronde rebaptisée place Soweto en 1983, en plein coeur de la lutte contre l'apartheid sud-africain. Ce militantisme n'était pas pour déplaire au pacifiste Théodore Monod, qui, dès 1940, avait fait de Dakar et de l'IFAN la base avancée de la France libre, accueillant des chercheurs comme le cinéaste Jean Rouch, expulsé du Niger. A l'occasion de la réédition d'Alors le Noir et le Blanc seront amis, carnets de mission 1946-1951 de Jean Rouch (Le Monde du 18 décembre), le Musée Théodore-Monod de Dakar propose une exposition de ses photographies prises le long du fleuve Niger, où il était parti sur les traces de l'explorateur écossais Mungo Park, mort en 1805 dans les rapides de Boussa, au Nigeria. C'est une frange d'histoire partagée, dit Ibrahima Thiaw. "Mais l'ethnographie et la découverte des arts premiers, accusés d'être venus dans les valises du colonisateur, continuent d'être rejetés par une partie des intellectuels africains", ajoute cet archéologue formé à l'université de Houston (Texas). Si le musée dakarois compte aussi peu de pièces sénégalaises, c'est que "dès 1950, les Wolofs, islamisés, et en contact commercial depuis très longtemps avec les Arabes et les Européens, n'étaient plus un objet de fascination ethnographique pour ces derniers". LE PRIX DE LA MÉMOIREIbrahima Thiaw est devenu archéologue par indignation. Il a mené huit campagnes de fouilles successives sur l'île de Gorée, en face de Dakar, à partir de 2001, sous l'impulsion première du National Geographic. Ces fouilles montrèrent le vrai visage de Gorée, symbole de la traite d'esclaves, mais aussi lieu de métissage ancien. Le Musée historique de Gorée est lui aussi géré par l'IFAN, dont le budget annuel, dérisoire, est inchangé depuis vingt ans (autour de 120 millions de francs CFA, 183 000 euros). L'IFAN doit maintenir avec cela des activités scientifiques pluridisciplinaires et veiller à ses collections. Dans un Sénégal au bord de l'implosion sociale, à qui la France vient d'octroyer un prêt de 125 millions d'euros sans conditions, M. Thiaw a peu d'espoir de capter davantage de fonds publics. Mais il désire sensibiliser le pouvoir politique à la conservation de la mémoire. "Chaque jour, explique-t-il, nous assistons à la destruction massive de nos sites par des sociétés nationales, que ce soit sur la corniche dakaroise, ou dans la moyenne vallée du fleuve Sénégal, sans qu'aucune loi ne protège cette mémoire. Bientôt, ceux qui soutiennent que l'Afrique n'a pas su produire d'Histoire auront raison : tout aura été effacé." Véronique Mortaigne Le Monde
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