Les jeunes filles du village de Fadiga de la communauté rurale de Bandafassi se rebiffent contre les pratiques dont elles sont victimes, notamment le mariage forcé et autres brimades. Elles ont clamé leur opposition désormais à ces pratiques à l’occasion d’une rencontre de plusieurs villages du secteur, organisée par l’Organisation non gouvernementale « TOSTAN ». Les chefs de village, le représentant du président de la Communauté rurale, les chefs religieux et coutumiers présents ont ainsi du témoigner de la détermination des jeunes filles qui n’entendent plus se laisser faire.
Les émigrés n’ont qu’à voir ailleurs. Les jeunes de Fadigo ne seront plus désormais taillables, corvéables et « mariables » au gré de leurs désirs. Les droits et devoirs des filles et des femmes ont été souvent bafoués dans la région de Kédougou. L’intervention de l’Ong Tostan dans les trois arrondissements du département du même nom est en train cependant de changer l’ordre des choses. Fadiga ou ex-village des lépreux a été le point de ralliement hier, dimanche 8 juin de plus d’une dizaine de villages de la communauté rurale de Bandafassi où comme partout dans la nouvelle région de Kédougou les jeunes sont données très tôt en mariage surtout aux émigrés.
Le phénomène a créé du coup l’abandon de l’école par ces filles victimes parfois de la pauvreté de leurs parents et par des considérations d’ordre sociologique et culturel. Car les liens de parenté priment même sur la raison ou sur les droits et devoirs. « La stratégie que nous adoptons s’appelle les modèles de diffusion organisés et ça nous permet de toucher le maximum de cibles » a déclaré Aly Bâ superviseur de l’Ong. C’est par des images à l’appui et un sketch que parents, chefs coutumiers et religieux ont perçu le message des filles. Les droits essentiels de tout individu ont été montrés.
Du droit à la famille au droit à l’information en passant par les droits à l’expression, au vote, à un environnement sain, à l’éducation surtout et pour le maintien des filles à l’école, rien n’a été laissé au hasard et le message a atteint ses cibles. « Je me rappelle quand je me mariais, ma femme n’avait que 13 ans, mais aujourd’hui avec tout ce que je viens de voir je ne donnerai aucune de mes filles en mariage tant qu’elles auront pas 18 ans ou plus », a indiqué le vieux Niakhasso qui semble bien comprendre la gravité d’un tel acte. Et d’ajouter « elles sont toutes à l’école qui représente leur mari donc même les émigrés qui pensent qu’ils peuvent avoir tout ce qu’ils veulent,qu’ils aillent aux diables et d’ailleurs on doit dénoncer et traduire en justice ces derniers et les parents qui le font en cachette » renchérissait-il.
Les mariages précoces et les grossesses ne sont pas les seuls supplices que vivent les jeunes filles du terroir. L’excision qui avait tant fait mal aux filles est aujourd’hui en net recul, même si elle est encore présente dans quelques localités parfois difficiles d’accès.
Les membres de l’Ong Tostan qui pensent qu’il y a des acquis, reconnaissent néanmoins que les choses ne font que commencer. Ils comptent intervenir dans tous les quatre arrondissements et leurs dix communautés rurales d’ici à 2010 avec les mêmes objectifs d’émancipation des filles par elles-mêmes.