LA MONTEE AU CIEL DE L’ENVOYE DE DIEU
(paix et bénédiction de Dieu sur lui)
Après la visite de Jérusalem, racontait le prophète, on m’apporta une échelle, mi’râj. C’était ce que j’avais vu de plus beau au monde. Mon compagnon Gibrîl me fit par cette échelle, monter au ciel, jusqu’à une porte appelée porte des gardes. Un ange, du nom de ‘Izrâ’îl, en défendait l’entrée. Il avait sous ses ordres douze mille anges et chacun de ces derniers commandait encore douze mille anges. Dieu seul connaît le nombre de ses légions !
- Qui est-ce ? demanda ‘Izrâ’il à Gibrîl.
- C’est Muhammad, répondit Gibrîl.
- A-t-il été envoyé par Dieu ?
- Oui, répondit Gibrîl.
Le gardien du ciel me souhaita alors du bien et me laissa entrer.
A mon entrée au premier ciel, je vis un homme assis, devant lequel défilaient les âmes des fils d’Adam. Aux unes, il manifestait sa satisfaction et sa joie en ces termes : « Voilà une âme pure sortie d’un corps pur ! » Aux autres, il disait d’un ton sévère : « Une âme mauvaise, sortie d’un
corps mauvais ! »
- Qui est-ce ? demandai-je à Gibrîl.
- C’est Adam, ton père, qui passe ainsi en revue les âmes de sa descendance : les croyants sont bien acceuillis et bénis ; les incroyants réprouvés et rejetés avec dégoût.
Autour de moi, poursuivit le Prophète, les anges me faisaient bon accueil. Ils étaient tout contents de me voir et, avec un large sourire, ils me souhaitaient beaucoup de bien. Seul un ange cependant n’a pas montré de joie à mon arrivée et n’a même esquissé un sourire en me saluant.
- Qui est-ce ? demandai-je à Gibrîl
- S’il avait déjà souri à quiconque avant toi ou si jamais il sourit à quiconque après toi, il t’aurait souri. C’est l’ange gardien de l’Enfer : il ne sourit jamais.
- Ne pourrais-tu pas lui demander de me montrer l’Enfer ?
- Si, répondit Gibrîl.
Et il demanda à l’ange d’ouvrir les portes de l’Enfer. Le feu est monté ; il s’est élevé au point de tout engloutir autour de moi.
- Demande au Gardien de repousser les flammes jusqu’à leur niveau habituel. Et l’ange dit : « Feu, calme-toi ! » Le feu se calma et se retira
tout comme l’ombre se retire.
Je vis alors en Enfer des hommes aux lèvres aussi épaisses que les lèvres de chameaux ; ils avaient à la main des boules de feu comme des cailloux qu’ils lançaient dans leur bouche et qui leur traversaient tout le corps.
- Qui sont tous ces gens, Gibrîl ?
- Ce sont les gens qui mangent le bien des orphelins, répondit-il.
Puis je vis des hommes au ventre énorme ; je n’en avais jamais vu de tels. Ils étaient piétinés par des chameaux en fureur et maintenus ainsi au-dessus des flammes, sans pouvoir se retourner.
- Qui sont-ils, Gibrîl ?
- Ce sont les usuriers.
Puis je vis des hommes qui avaient devant eux de la viande fraîche et belle et, à côté, une viande avariée et infecte. Ils mangeaient la viande puante et laissaient de côté la viande grasse et belle.
- Qui sont-ils, Gibrîl ?
- Ce sont les hommes qui délaissent les femmes que Dieu leur a accordées pour rechercher les femmes interdites.
Puis je vis des femmes pendues par les seins.
- Qui sont-elles, Gibrîl ?
- Ce sont les femmes qui donnent à leur mari des enfants conçus avec d’autres hommes.
L’Envoyé de Dieu poursuivit : puis Gibrîl me fit monter au deuxième ciel. J’y rencontrai les deux cousins maternels, Jésus, fils de Marie, et Yahya, fils de Zakharie (Jean Baptiste)
Puis Gibrîl me fit monter au troisième ciel. J’y vis un homme beau comme la pleine lune.
- Qui est-ce, Gibrîl ?
- C’est ton frère Joseph, fils de Jacob.
Puis il me fit monter au quatrième ciel, où je vis le prophète Idrîs.
Nous l’avons élevé à une place sublime.(Coran, 19,57.)
Monté au cinquième ciel, j’y vis un homme d’âge mûr aux cheveux blancs, à la barbe blanche et imposante. Je n’avais jamais vu un homme d’une telle beauté à cet âge.
- Qui est-ce, Gibrîl ?
- C’est Aaron, frère de Moïse, fils de ‘Imrân, bien-aimé de son peuple.
Monté au sixième ciel, j’y vis un homme brun, de grande taille, au nez busqué.
- Qui est-il, Gibrîl ?
- C’est ton frère Moïse, fils de ‘Imrân.
Au septième ciel, je vis un homme d’âge mûr assis dans un fauteuil à la porte de la Maison céleste. Tous les jours entrent dans cette maison soixante-dix mille anges et ils n’en ressortent que le jour de la résurrection. Je n’avais jamais vu un homme avec qui j’eusse plus de ressemblance.
- Qui est-il, Gibrîl ?
- C’est ton père Ibrâhim (Abraham)
Puis, poursuivit Muhammad, il me fit entrer au Paradis et j’y vis une jeune femme aux lèvres d’un rouge sombre, qui me plut du premier coup d’œil.
- A qui appartiens-tu ? lui demandai-je.
- A Zayd ibn Hâritha, ton affranchi, répondit-elle. A son retour, le Prophète annonça cette bonne nouvelle à Zayd ibn Hâritha.
Puis Gibrîl me mit en présence de Dieu, qui m’imposa cinquante prières quotidiennes. Sur le chemin du retour, poursuivit le Prophète, je revis Moïse. Quel excellent ami ! il me demanda :
- Combien de prières t’a imposées le Seigneur ?
- Cinquante par jour, répondis-je.
- La prière est lourde, dit-il, et ton peuple est faible. Reviens voir le Seigneur et demande-lui d’alléger ce fardeau qui pèserait sur toi et sur ton peuple.
Je revins et demandai au Seigneur d’alléger notre fardeau. Il m’en remit dix et je m’en revins. Moïse me dit que c’était encore trop lourd et qu’il fallait revenir voir le Seigneur. Je revins et fis la même requête. Dieu me remit encore dix prières. A mon retour, Moïse me tint encore le même language et je revins voir le Seigneur qui me remit encore dix autres prières. Je ne cessai de faire ainsi la navette entre Moïse et Dieu jusqu’à ce que Dieu m’imposât seulement cinq prières par jour. Moïse me dit pourtant de tenter un dernier allégement, mais je refusai : j’avais honte d’avoir trop demandé à Dieu. Celui donc qui parmi vous accomplit les cinq prières aura le mérite et la récompense des cinquante prières initialement imposées.