Toute la culture sénégalaise, l'expression des jeunes sénégalais, le sénégal vue en profondeur. |
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| Léopold Sédar Senghor | |
| | Auteur | Message |
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julie .:::|| ami ||:::.
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| Sujet: Léopold Sédar Senghor Mar 27 Mar 2007 - 23:05 | |
| Comme je passais
Comme je passais rue Fontaine, Un plaintif air de jazz Est sorti en titubant, Ébloui par le jour, Et m'a chuchoté sa confidence Discrètement Comme je passais tout devant La Cabane cubaine. Un parfum pénétrant de Négresse L'accompagnait.
Voilà des nuits, Voilà bien des jours au sommeil absent. Réveillés en moi les horizons que je croyais défunts. Et je saute de mon lit tout à coup, comme un buffle Mufle haut levé, jambes écartées,
Comme un buffle humant, dans le vent Et la douceur modulée de la flûte polie, La bonne odeur de l'eau sous les dakhars Et celle, plus riche de promesses, des moissons mûres Par les rizières.
Dernière édition par le Sam 29 Déc 2007 - 23:45, édité 2 fois | |
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| Sujet: Léopold Sédar Senghor Sam 29 Déc 2007 - 23:37 | |
| Lettres d'hivernage
TU PARLES
Tu parles de ton âge, de tes fils de soie blanche. Regarde tes mains pétales de laurier-rose, ton cou le seul pli de la grâce. J'aime les cendres sur tes cils tes paupières, et tes yeux d'or mat et tes yeux Soleil sur la rosée d'or vert, sur le gazon du matin Tes yeux en Novembre comme la mer d'aurore autour du Castel de Gorée. Que de forces en leurs fonds, fortunes des caravelles, jetées au dieu d'ébène !
J'aime tes jeunes rides, ces ombres que colore d'un vieux rose Ton sourire de Septembre, ces fleurs commissures de tes yeux de ta bouche. Tes yeux et ton sourire, les baumes de tes mains le velours la fourrure de ton corps Qu'ils me charment longtemps au jardin de l'Eden Femme ambiguë, toute fureur toute douceur.
Mais au coeur de la saison froide Quand les courbes de ton visage plus pures se présenteront Tes joues plus creuses, ton regard plus distant, ma Dame Quand de sillons seront striés, comme les champs l'hiver, ta peau ton cou ton corps sous les fatigues Tes mains minces diaphane, j'atteindrai le trésor de ma quête rythmique Et le soleil derrière la longue nuit d'angoisse La cascade et la même mélopée, les murmures des sources de ton âme.
Viens, la nuit coule sur les terrasses blanches, et tu viendras La lune caresse la mer de sa lumière de cendres transparentes. Au loin, reposent des étoiles sur les abîmes de la nuit marine L'Ile s'allonge comme une voie lactée. Mais écoute, entends-tu? les chapelets d'aboiements qui montent du cap Manuel Et monte du restaurant du wharf et de l'anse Quelle musique inouïe, suave comme un rêve
Chère !.... | |
| | | julie .:::|| ami ||:::.
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| Sujet: Re: Léopold Sédar Senghor Dim 30 Déc 2007 - 0:28 | |
| Poèmes Perdus
Printemps
Des nuages s'étirent, s'étirent irréels, Entre les branches noires enlacés. Tout l'hiver devant ma fenêtre, qui s'en va Et la danse de lumière sur les crêtes lointaines.
Cet oiseau jamais aperçu ! Et le printemps et mon amour. Mes yeux qui s'éclairent, mes lèvres qui éclosent, Mon corps ...
Il fait très doux et très clair. Le monde est calme autour, en tendresse. Oh ! un moment, rien qu'un moment de calme pour toute souffrance. Car Dossie pleure les cris matinaux de ses enfants.
Du monde je ne vois qu'un rectangle bleu Strié de noir luisant. Les branches tendent leurs bourgeons au soleil, Lèvres ouvertes, lèvres offertes.
Je n'entends que le chant de l'ami inconnu, Le pas monotone d'un pion Et mon amour qui pousse dans le silence Du printemps. | |
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| Sujet: Re: Léopold Sédar Senghor Dim 30 Déc 2007 - 0:30 | |
| Chants d'ombre
Nuit de Siné
Femme, pose sur mon front tes mains balsamiques, tes mains douces plus que fourrure. Là-haut les palmes balancées qui bruissent dans la haute brise nocturne À peine. Pas même la chanson de nourrice. Qu'il nous berce, le silence rythmé. Écoutons son chant, écoutons battre notre sang sombre, écoutons Battre le pouls profond de l'Afrique dans la brume des villages perdus.
Voici que décline la lune lasse vers son lit de mer étale Voici que s'assoupissent les éclats de rire, que les conteurs eux-mêmes Dodelinent de la tête comme l'enfant sur le dos de sa mère Voici que les pieds des danseurs s'alourdissent, que s'alourdit la langue des choeurs alternés.
C'est l'heure des étoiles et de la Nuit qui songe S'accoude à cette colline de nuages, drapée dans son long pagne de lait. Les toits des cases luisent tendrement. Que disent-ils, si confidentiels, aux étoiles ? Dedans, le foyer s'éteint dans l'intimité d'odeurs âcres et douces.
Femme, allume la lampe au beurre clair, que causent autour les Ancêtres comme les parents, les enfants au lit. Écoutons la voix des Anciens d'Elissa. Comme nous exilés Ils n'ont pas voulu mourir, que se perdît par les sables leur torrent séminal. Que j'écoute, dans la case enfumée que visite un reflet d'âmes propices Ma tête sur ton sein chaud comme un dang au sortir du feu et fumant Que je respire l'odeur de nos Morts, que je recueille et redise leur voix vivante, que j'apprenne à Vivre avant de descendre, au-delà du plongeur, dans les hautes profondeurs du sommeil. | |
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| Sujet: Re: Léopold Sédar Senghor Dim 30 Déc 2007 - 2:07 | |
| ET LE SOLEIL
Et le soleil boule de feu, déclive sur la mer vermeille. Au bord de la brousse et de l'abîme, je m'égare dans le dédale du sentier. Elle me suit, cette senteur haute altière qui irrite mes narines Délicieusement. Elle me suit et tu me suis, mon double.
Le soleil plonge dans l'angoisse Dans un foisonnement de lumières, dans un tressaillement de couleurs de cris de colères. Une pirogue, fine comme une aiguille dans une mer immense étale Un rameur et son double. Saignent les grès du cap de Nase quand s'allume le phare des Mamelles Au loin. Le chagrin tel me point à ta pensée.
Je pense à toi quand je marche je nage Assis ou debout, je pense à toi le matin et le soir La nuit quand je pleure, eh oui quand je ris Quand je parle je me parle et quand je me tais Dans mes joies et mes peines. Quand je pense et ne pense pas Chère je pense à toi ! | |
| | | julie .:::|| ami ||:::.
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| Sujet: Re: Léopold Sédar Senghor Mer 16 Jan 2008 - 16:27 | |
| Offrande
Je viens t'offrir l'offrande de mon amour Printanier.
Il est rouge comme l'autel Du sacrifice ancestral, Droit comme un fût de rônier, Pur comme l'or de Galam.
Je viens t'offrir l'offrande de mon amour A genoux. | |
| | | julie .:::|| ami ||:::.
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| Sujet: Re: Léopold Sédar Senghor Mer 16 Jan 2008 - 16:59 | |
| TU TE LANGUIS
Tu te languis de Dakar de son ciel de son sable, et de la mer Je me languis de toi, comme d'un bonheur adolescent en automne. Je chante en t'écrivant, comme le bon artisan qui travaille un bijou d'or. Alors je danserai, léger et grave, la danse de ma Dame Et pour ma seule Dame !
Simplement ton pays au déclin de Septembre, où les nuits sont plus fraîches Les jours plus cristallins. Et la lumière joue souple soyeuse Dans les rideaux, et sonne sur les bronzes sombres, et chante sur les plats d'argent. La lumière dans le ciel bleu, violet à peine, joyeux et léger innocent. Fument au loin les brumes basses sur les villages alanguis.
Chanter la floraison de Septembre dernière, la confusion des parfums transparents Ah ! chanter la lumière de tes yeux grands étales Quand saigne mon coeur sur la vigne vierge, pour la dernière fois, Dans l'arrière saison, avant que ne soient les vendanges Jamais mais jamais tu ne sera plus pathétiquement belle.
A la fin de l'été, pour chanter tes yeux tes senteurs beauté Dieu ! que je vête la chape d'or des marronniers, non ! pourpres des érables sur les Laurentides Ou sous la lune, le ong pagne d'opale des peupliers au bord de l'eau. Tu viendras, et je t'attendrai à la fin de l'hivernage. Sous la rosée qui s'irise, tu seras comme le filao sous une neige de grâce. | |
| | | julie .:::|| ami ||:::.
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| Sujet: Re: Léopold Sédar Senghor Lun 18 Fév 2008 - 10:43 | |
| Le Salut du Jeune Soleil.
Le salut du jeune soleil Sur mon lit, la lumière de ta lettre Tous les bruits qui fusent du matin Les cris métalliques des merles, les clochettes des gonoleks Ton sourire sur le gazon, sur la rosée splendide.
Dans la lumière innocente, des milliers de libellules Des frisselants, comme des abeilles d'or ailes noires Et comme des hélicoptères aux virages de grâce et de douceur Sur la plage limpide, or et noir les Tramiae basilares Je dis la danse des princesses du Mali.
Me voici à ta quête, sur le sentier des chats-tigres. Ton parfum toujours ton parfum, de la brousse bour- donnant des buissons Plus exaltant que l'odeur du lys dans sa surrection. Me guide, ta gorge odorante, ton parfum levé par l'Afrique Quand sous mes pieds de berger, je foule les menthes sauvages. Au bout de l'épreuve et de la saison, au fond du gouffre Dieu ! que je te retrouve, retrouve ta voix, ta fragrance de lumière vibrante.
Lettre d'hivernage | |
| | | julie .:::|| ami ||:::.
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| Sujet: Re: Léopold Sédar Senghor Sam 5 Avr 2008 - 18:10 | |
| Je suis seul
Je suis seul dans la plaine Et dans la nuit Avec les arbres recroquevillés de froid Qui, coudes au corps, se serrent les uns tout contre les autres.
Je suis seul dans la plaine Et dans la nuit Avec les gestes de désespoir pathétique des arbres Que leurs feuilles ont quittés pour des îles d'élection.
Je suis seul dans la plaine Et dans la nuit. Je suis la solitude des poteaux télégraphiques Le long des routes Désertes. | |
| | | sistersandrine Co-Admin
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| Sujet: Re: Léopold Sédar Senghor Ven 30 Mai 2008 - 10:46 | |
| Femme nue, femme noire Vétue de ta couleur qui est vie, de ta forme qui est beauté J'ai grandi à ton ombre; la douceur de tes mains bandait mes yeux Et voilà qu'au coeur de l'Eté et de Midi, Je te découvre, Terre promise, du haut d'un haut col calciné Et ta beauté me foudroie en plein coeur, comme l'éclair d'un aigle Femme nue, femme obscure Fruit mûr à la chair ferme, sombres extases du vin noir, bouche qui fais lyrique ma bouche Savane aux horizons purs, savane qui frémis aux caresses ferventes du Vent d'Est Tamtam sculpté, tamtam tendu qui gronde sous les doigts du vainqueur Ta voix grave de contralto est le chant spirituel de l'Aimée
Femme noire, femme obscure Huile que ne ride nul souffle, huile calme aux flancs de l'athlète, aux flancs des princes du Mali Gazelle aux attaches célestes, les perles sont étoiles sur la nuit de ta peau.
Délices des jeux de l'Esprit, les reflets de l'or ronge ta peau qui se moire
A l'ombre de ta chevelure, s'éclaire mon angoisse aux soleils prochains
de tes yeux.
Femme nue, femme noire Je chante ta beauté qui passe, forme que je fixe dans l'Eternel Avant que le destin jaloux ne te réduise en cendres pour nourrir les racines de la vie.
écrit par : léopold sédar senghor
Extrait de " Oeuvres Poétiques"
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| | | julie .:::|| ami ||:::.
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| Sujet: Re: Léopold Sédar Senghor Sam 12 Juil 2008 - 12:46 | |
| Poèmes Perdus BLUES
Je suis envahi de brume Et de solitude Aujourd'hui, Et je fuis.
Livre ouvert en moi. Dans mon cerveau gris Défilent des mots vides Et défilent des pages, rues désertes Sans cabarets.
Chère âme, allonge-toi sur le divan long Et jette l'ancre, Et laisse descendre jusqu'au fond. Oui, jette l'ancre !
Dernière édition par julie le Sam 12 Juil 2008 - 12:52, édité 1 fois | |
| | | julie .:::|| ami ||:::.
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| Sujet: Re: Léopold Sédar Senghor Sam 12 Juil 2008 - 12:49 | |
| Poèmes Perdus
Régénération
Sous le pagne lisse du ciel d'été, Le soleil a saccagé Le velours vert des jours d'enfance. Et les grêles, les orages Ont déchaîné la fureur de leurs bandes barbares, Dans la plaine où soupire le silence Affaissé, les cigales tout ivres de sang Trompètent mes défaites, Qu'ils dorment les morts d'hier !
Dans tes yeux de fraîcheur et d'aube, Parfumés de l'odeur d'automne, A reverdi mon idéal régénéré, Je veux, sous les étendards de tes cils, bercé Par la flûte matinale des pelouses tendres, Dormir en attendant quel grand réveil sanglant ! | |
| | | julie .:::|| ami ||:::.
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| Sujet: Re: Léopold Sédar Senghor Sam 21 Nov 2009 - 12:49 | |
| Hosties noires
AUX TIRAILLEURS SENEGALAIS MORTS POUR LA FRANCE
Voici le Soleil Qui fait tendre la poitrine des vierges Qui fait sourire sur les bancs verts les vieillards Qui réveillerait les morts sous une terre maternelle. J'entends le bruit des canons - est-ce d'Irun? On fleurit les tombes, on réchauffe le Soldat Inconnu. Vous mes frères obscurs, personne ne vous nomme. On promet cinq cent mille de vos enfants à la gloire des futurs morts, on les remercie d'avance futurs morts obscurs Die Schwarze schande !
Ecoutez-moi, Tirailleurs sénégalais, dans la solitude de la terre noire et de la mort Dans votre solitude sans yeux sans oreilles, plus que dans ma peau sombre au fond de la Province Sans même la chaleur de vos camarades couchés tout contre vous, comme jadis dans la tranchée jadis dans les palabres du village Ecoutez-moi, Tirailleurs à la peau noire, bien que sans oreilles et sans yeux dans votre triple enceinte de nuit.
Nous n'avons pas loué de pleureuses, pas même les larmes de vos femmes anciennes - Elles ne se rappellent que vos grands coups de colère, préférant l'ardeur des vivants. Les plaintes des pleureuses trop claires Trop vite asséchées les joues de vos femmes, comme en saison sèche les torrents du Fouta Les larmes les plus chaudes trop claires et trop vite bues au coin des lèvres oublieuses.
Nous vous apportons, écoutez-nous, nous qui épelions vons noms dans les mois que vous mouriez Nous, dans ces jours de peur sans mémoire, vous appor- tons l'amitié de vos camarades d'âge. Ah ! puissé-je un jour d'une voix couleur de braise, puissé-je chanter L'amitié des camarades fervente comme des entrailles et délicate, forte comme des tendons. Ecoutez-nous, Morts étendus dans l'eau au profond des plaines du Nord et de l'Est. Recevez ce sol rouge, sous le soleil d'été ce sol rougi du sang des blanches hosties Recevez le salut de vos camarades noirs, Tirailleurs sénégalais MORTS POUR LA REPUBLIQUE !
Tours, 1938 | |
| | | julie .:::|| ami ||:::.
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| Sujet: Re: Léopold Sédar Senghor Ven 18 Déc 2009 - 20:36 | |
| Poèmes perdus
Départ
Je suis parti Par les chemins bordés de rosée Où piaillait le soleil.
Je suis parti Loin des jours croupissants Et des carcans, Vomissant des laideurs A pleine gueule.
Je suis parti Pour d'étranges voyages, Léger et nu, Sans bâton ni besace, Sans but.
Je suis parti Pour toujours Sans pensée de retour. Vendez tous mes troupeaux, Mais pas les bergers avec.
Je suis parti Vers des pays bleus, Vers des pays larges, Vers des pays de passions tourmentés de tornades, Vers des pays gras et juteux.
Je suis parti pour toujours, Sans pensée de retour, Vendez tous mes bijoux. | |
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