Diffusion inquiétante de bactéries résistantes aux antibiotiques
Des bactéries humaines résistantes aux antibiotiques se diffusent de manière inquiétante dans l'environnement hors des hôpitaux et posent "un enjeu majeur de santé publique", selon une étude réalisée en Camargue par des chercheurs.
L'étude, publiée dans la revue PlosOne par une équipe française du centre de recherche de la Tour du Valat et des équipes suédoises des universités d'Uppsala, d'Umea et Kalmar, porte sur les goélands leucophées, des oiseaux sauvages abondants sur le littoral méditerranéen et pouvant être considérés comme des bio-indicateurs de l'état de l'environnement.
"On observe maintenant de manière inquiétante une diffusion de ces bactéries résistantes en dehors du cadre hospitalier", selon un communiqué de la Tour du Valat, "l'homme peut ainsi être désormais exposé à ces infections dans des environnements non cliniques".
L'étude montre la présence d'un niveau important de résistances à six antibiotiques, notamment la tétracycline, la streptomycine et l'ampicilline. Les goélands sont porteurs "de taux élevés de bactéries Escherichia coli produisant des beta-lactamases à spectre étendu de type CTX-M et de variants humains présents dans les hôpitaux de cette région".
"Les analyses génétiques indiquent une transmission de l'homme à la faune sauvage à plusieurs reprises", souligne le communiqué.
Les premiers CTX-M ont été identifiés en 1989 et repérés en France dans les hôpitaux au début des années 2000, notamment dans le Nord. Dans le Sud-Est, région où comme dans tout le pays l'usage d'antibiotiques en médecine humaine et vétérinaire est à des niveaux relativement élevés, les CTX-M ont été identifiés à partir de 2004 dans plusieurs hôpitaux.
"Le haut niveau de résistance général observé dans cette étude est probablement le résultat d'une exposition directe ou indirecte de longue date aux activités humaines dans une région, entre Montpellier et Marseille, présentant une relativement haute pression antibiotique", relève le communiqué.
"L'émergence de ces bactéries résistantes aux antibiotiques représente un enjeu majeur de santé publique", selon les auteurs de l'étude, dont les résultats "posent aussi le problème de la persistance à long terme de ces bactéries dans l'environnement et de leur dissémination à une vaste échelle, alors qu'elles étaient auparavant limitées au milieu hospitalier".
"Un risque supplémentaire est la création dans l'environnement de creusets favorables au développement de nouveaux types de résistance", soulignent-ils.
Pour limiter les risques, les chercheurs suggèrent "une surveillance active des bactéries résistantes sélectionnées et l'utilisation optimale et raisonnée des antibiotiques, le contrôle des effluents d'hôpitaux et d'élevage ainsi que des eaux usées municipales, tous contenant des bactéries porteuses de gènes de résistance contaminant l'environnement".
Les oiseaux étudiés proviennent d'une colonie près de Port-Saint-Louis qui se nourrit essentiellement des poubelles de Marseille et d'une autre près d'Aigues-Mortes qui se nourrit plutôt en mer.
AFP