Haro sur les pesticides:
les victimes appelées à s'unir pour se défendre
Les pesticides font peser un risque pour la santé des agriculteurs mais aussi des jardiniers ou de simples particuliers vivant à proximité des cultures, selon des associations qui créent un réseau de défense des victimes.
"Cela fait des années qu'on reçoit des coups de fils de personnes qui se plaignent d'être exposées aux pesticides ou qui sont malades", a expliqué jeudi François Veillerette, président du Mouvement pour les droits et le respect des générations futures (MDRGF) à l'origine de cette initiative avec le réseau Health and environment alliance (Heal) basé à Bruxelles.
"On a eu envie d'aller plus loin pour protéger les populations et faire avancer le dossier de la reconnaissance des droits de la victime", a-t-il ajouté devant la presse.
Patrick, agriculteur en Alsace, témoigne: "j'ai la maladie de Parkinson", déclare-t-il, estimant avoir été intoxiqué par les pesticides. Il y a une vingtaine d'années, "j'ai été douché aux pesticides en désherbant du maïs suite à une rupture de canalisation du pulvérisateur", explique-t-il.
"J'ai fait un dossier pour obtenir une reconnaissance de maladie professionnelle", indique-t-il. "Le dossier est en cours mais le neurologue n'ose pas s'engager car il craint des retombées".
Les risques de développer certaines pathologies sont réels et les victimes se retrouvent souvent isolées, font valoir le MDRGF et Heal.
L'exposition aux pesticides double quasiment le risque de survenue de la maladie de Parkinson chez les agriculteurs, selon une équipe de chercheurs de l?Inserm et de l'Université Pierre et Marie Curie dont les travaux ont été publiés mercredi.
De simples particuliers, résidant à proximité de cultures intensives, se plaignent également de ces épandages de pesticides.
"Lors des périodes de traitement, c'est l'enfer", assure Bertrand Pouchin qui habite en Eure-et-Loire une maison entourée de céréales.
"Mon fils, agé de 4 ans, souffre d'une hyperthyroïdie", indique-t-il. Les pesticides, "c'est devenu mon combat quotidien".
Robert Courtade, un retraité qui vit au pays basque, et a pour voisin un arboriculteur producteur de pommes ayant recours massivement aux pesticides, assure que sa famille souffre de "toux et d'irritations".
Même les citadins sont concernés car ils peuvent subir des pulvérisations de pesticides s'ils sont riverains d'espaces verts.
La législation actuelle ne garantit pas une protection suffisante aux victimes, estiment les associations.
Il n'existe pas de limites de protection autour des habitations exposées à des pulvérisations, pas plus que de normes atmosphériques d'exposition des riverains, alors que des produits pourtant reconnus dangereux par différentes agences au niveau international sont autorisés, souligne Aurèle Clémencin, du chargé de mission au Mdrgf.
Stéphane Cottineau, avocat, déplore "l'absence de réglementation sérieuse concernant les particuliers qui subissent les épandages de pesticides".
Le MDRGF demande aux trois ministères concernés (Santé, Ecologie et Agriculture) que les pesticides les plus dangereux soient retirés du marché, que des zones tampons soient mises en place dans les campagnes pour protéger les gens qui résident près des cultures intensives et que l'usage des pesticides en ville soit interdit.
A l'appui, un site internet (
www.victimes-pesticides.org) a été ouvert afin de "permettre aux gens de s'exprimer", selon François Veillerette.
Par Emmanuel ANGLEYS