Les mineurs délinquants responsables dès 12 ans
Incarcération possible plus tôt pour les jeunes accusés de crimes, sanctions plus fermes et tribunaux proches de ceux réservés aux adultes
RAPIDITE accrue des procédures et rapprochement du statut des mineurs de celui des majeurs. La commission sur la réforme de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante, mise en place le 15 avril dernier et présidée par l’universitaire André Varinard, a achevé hier ses travaux. Elle devrait remettre son rapport à la garde des Sceaux, Rachida Dati, le 3 décembre.
Il aura donc fallu moins de huit mois à ses trente-deux membres pour élaborer les grandes lignes de ce que pourrait être le futur « code de la justice pénale des mineurs ».
La responsabilité pénale fixée à 12 ans. Jusqu’à présent, la responsabilité pénale était laissée à l’appréciation du juge chargé d’évaluer lui-même le « discernement » de l’enfant mis en cause. Il n’y avait donc pas d’âge limite pour interroger et juger des mineurs délinquants. Sous la pression de l’Europe et selon les propositions de la commission Varinard, la responsabilité pénale pourrait être désormais fixée à 12 ans, avec des dérogations possibles jusqu’à 10 ans pour les délits graves. « Douze ans, c’est tard, regrette un parquetier spécialisé. Dans certains cas, il est important de pouvoir entendre ou juger un enfant plus tôt. »
L’incarcération des mineurs possible dès 12 ans ? Actuellement, un mineur ne peut être incarcéré, en matière criminelle, qu’à partir de 13 ans. La commission souhaiterait désormais ne rendre possible l’incarcération d’un mineur qu’à partir de 14 ans. Mais elle instituerait une exception en matière criminelle où l’emprisonnement pourrait être ordonné plus tôt, peut-être dès 12 ans.
La majorité pénale maintenue à 18 ans. En cette matière, pas de changement. La majorité pénale c’est à dire le fait d’encourir les mêmes peines que les adultes est maintenue à 18 ans. Cet âge peut néanmoins être abaissé à 16 ans en cas de multirécidive. A partir de 16 ans, l’excuse de minorité (qui divise par deux les peines encourues) continue à pouvoir être remise en cause à la discrétion du magistrat.
De nouveaux tribunaux. Ce que la commission veut changer, c’est le type de tribunal qui jugera ces jeunes. Pour l’ensemble des mineurs ayant commis des infractions simples, la commission Varinard invite à créer un tribunal pour mineurs à juge unique. En cas de récidive, pour les 16-18 ans, ce ne serait plus un tribunal pour enfants, mais un tribunal correctionnel classique doté d’un juge spécialisé, qui pourrait être compétent. « Si cela se confirme, cela constituerait une atteinte gravissime au principe de minorité et à la spécificité de la justice des mineurs », s’alarme un magistrat.
Sanctions plus fermes et délais plus rapides. Pour accélérer les procédures, le procureur devra procéder à un tri dans les dossiers en traitant prioritairement les infractions les plus simples. Pour éviter l’empilement des mesures peu dissuasives, un seuil sera fixé à partir duquel les sanctions devront être graduellement de plus en plus sévères. Si la prison doit rester une « exception », la commission préconise l’extension des centres éducatifs fermés.
Le contentieux civil confié aux départements. Les mesures éducatives et de protection des mineurs, qui relèvent du contentieux civil, ne seraient plus prises en charge par la justice, mais par les conseils généraux.
Le Parisien